
Les freins non scientifiques
Je suis sur qu’autour de vous vous avez déjà entendu quelqu’un vous raconter le principe de fabrication des médicaments homéopathiques ainsi:
« Tu vides un flacon d’Arnica dans la Seine depuis le pont des Arts à Paris, tu prends ta bagnole jusque Rouen, tu remplis ton flacon et hop tu as de l’Arnica dilué prêt à l’emploi »
Pour le grand public qui ne va pas plus loin que ce genre de bêtises, cela participe à ancrer cette médecine comme discipline non rigoureuse et empêche de l’aborder un tant soit peu sérieusement.
On me demande souvent : « vous y croyez docteur à l’homéopathie? »
Et je réponds toujours: « absolument pas! »
Cela surprend et j’ajoute alors que l’homéopathie n’est pas une religion, elle ne fait pas partie du domaine de ces choses auxquelles on croit ou on ne croit pas.
Elle est à étudier pour comprendre ses principes et appliquer
sa méthodologie stricte et rigoureuse.
Tant que cette conception de « croyance » sera présente dans la population, le réflexe premier sera d’abonder vers le fait immuable qu’elle ne peut pas être scientifique.
On entend souvent aussi de façon raccourcie que l’homéopathie c’est
« soigner le mal par le mal« .
Soigner à base de médicaments dont la liste de symptômes établie par l’expérimentation sur des sujets sains se rapproche le plus possible de la liste de symptômes que le patient présente:
oui, trois fois oui!
Soigner un symptôme local à base d’un médicament connu pour provoquer ce symptôme local:
c’est faux et réducteur.
C’est méconnaitre les principes de base de l’homéopathie
à commencer par la loi des semblables.
Cette petite phrase courante entourant l’homéopathie participe elle aussi à la réduire, à la simplifier voire la diaboliser, empêchant de nouveau de l’aborder avec un
état d’esprit scientifique.
Le traitement médiatique par des personnes pseudo-scientifiques.
C’est devenu très à la mode de s’exprimer sur un sujet pour lequel on a aucune formation, connaissance, expérience.
Le sujet « Covid » en est un malheureux exemple:
65 millions de français = 65 millions d’experts sur cette maladie s’exprimant de façon clivante (tout blanc ou tout noir) sur les réseaux sociaux et plateaux de télévision.
L’homéopathie n’y échappe pas et l’exemple qui m’a le plus frappé personnellement est celui de Jérémi Ferrari sur lequel je vais m’attarder ici.
En préambule, je tiens à préciser que j’apprécie l’aspect dénonciateur, lanceur d’alerte que peuvent avoir les artistes, en particulier les humoristes.
J’estime qu’ils ont un rôle important à jouer, à condition d’avoir un discours vrai, documenté, étayé et d’amener les gens à réfléchir par eux mêmes.
Ce n’est pas le cas pour l’exemple qui va suivre.
Dans son spectacle « Anesthésie générale », il traite entre autres de l’homéopathie.
Vous pouvez voir ce qu’il en raconte lors de sa promo chez Ruquier ici
C’est affligeant! Ce monsieur se présente depuis toujours comme quelqu’un de documenté, asseyant ainsi une sorte d’autorité à ce qu’il dit.
Je veux bien croire en sa sincérité quand il dit avoir étudié le sujet, je me demande juste quelles sont ses sources car son intervention de 4 minutes et 16 secondes n’est que mensonges au sujet de l’homéopathie:
- « le fameux effet placebo » (Ruquier) sur lequel il rebondit: ce n’est pas le premier ni le dernier à manquer d’honnêteté à ce sujet en ne rappelant pas que cet effet existe pour n’importe quelle thérapie, conventionnelle comprise.
Je reviendrai plus en détail sur cet effet plus tard. - « Avec ce qu’ils ont remboursé cette année pour l’homéopathie, ils auraient pu embauché 2000 infirmières« .
Soit, c’est peut être vrai , en tout c’est un angle d’attaque des chiffres très à charge contre l’homéopathie.
Une autre lecture du budget alloué au remboursement de l’homéopathie en 2019 par la sécurité sociale pourrait tout aussi bien être que celui-ci ne représentait que 0,64% du total (voir ici).
C’est très facile et pas très honnête d’orienter des chiffres vers ce qu’on a envie d’établir comme vérité:
– qu’il y a bien d’autres leviers plus importants que l’homéopathie pour embaucher des infirmières comme je viens de le faire ou
– que l’homéopathie empêche d’embaucher 2000 infirmières comme il l’assène. - « caca d’autruche », « cul de putois », « crachat de coquelucheux », « sécrétion urétrale blennorragique purulente »: choix assez réducteur et orienté de 4 médicaments d’origine peu ragoutante sur les 2877 existants en homéopathie, le tout en se targuant de vouloir « que les gens sachent ce qu’ils prennent ».
Avec ces 4 exemples, ils sont au courant de 0,14% de ce qu’ils prennent, il reste encore un peu de travail pour compléter le tableau! - « à la fin de la dilution, cela représente un atome de foie de canard dans 5 fois l’Univers visible » en parlant d’Oscillococcinum.
Je note l’utilisation du mot « atome », nom scientifique qui donne forcément une certaine stature à ce qu’il dit. Cela fonctionne sur celles et ceux qui l’écoutent chez Ruquier.
Aucun d’entre eux n’a l’idée de lui demander à partir de quelle dilution.
La vérité est que pour n’importe quel médicament homéopathique, au delà de la 12 CH, on est en dessous des outils de mesure actuels scientifiques pour quantifier ce qu’il reste de la substance mère.
C’est la barrière du nombre d’Avogadro que j’aborderai plus tard.
De fait on est bien au delà de l’atome dès la 12CH. En attendant son message, enrobé par un mot scientifique et préparé par le fait qu’il dit s’être documenté et avoir « creusé le sujet », passe comme étant la vérité auprès du public. - « le créateur de l’homéopathie…trouve un jour un truc qu’on appelle l’oscillocoque«
C’est là la plus belle blague de Jérémy Ferrari: Hahnemann, fondateur de l’homéopathie est mort en 1843, Oscillococcinum a vu le jour au début du 20ème siècle, par le Dr Roy.
Un peu léger pour quelqu’un qui se présente au grand public comme « documenté« . - « homéovox, j’en prenais entre 3 et 8 par jour ».
Le problème qu’il soulève et avec lequel je le rejoins n’est pas tant l’homéopathie mais la partie commerciale inerrante à l’ensemble de l’industrie pharmaceutique. Les laboratoires et pharmacien.nes n’y échappent pas avec l’homéopathie, ni plus ni moins que pour les autres médicaments.
En vérité, un granule dilué dans une bouteille d’eau de 50 cl bue sur plusieurs jours suffit comme posologie.
Pas très rémunérateur, voire à perte d’où les posologies type « 3 granules matin, midi, et soir » pour les uns ou « 5 granules par jour pendant une semaine » pour les autres…
Ceci étant à minimiser sur le fait que les connaissances actuelles ne permettent pas de connaître le mécanisme d’action donc d’établir des posologies précises à ces médicaments.
Mr Ferrari se permet tout de même de confondre l’homéopathie, ses principes de base (qu’il ne connait vraisemblablement pas) et les pratiques commerciales pour un peu plus la dénigrer. - Concernant Oscillococcinum, largement abordé par Jérémi Ferrari, ce monsieur, s’il s’était si bien documenté, aurait pu savoir que la communauté homéopathique regrette la place que prend ce médicament.
En effet, quelques principes de base de cette médecine ne sont pas respectés pour l’utilisation de ce médicament et il ne devrait pas être autant utilisé.
Vous pouvez voir en détail pourquoi dans ce précédent article.
J’ai écrit tout cela à Mr Ferrari l’alertant aussi sur le mal qu’il participe à faire sur notre travail quotidien, sa rigueur, son sérieux et notre image.
Je n’ai pas eu de réponses de sa part.
Il a tout de même parlé de l’homéopathie de façon pseudo-scientifique à plus de 300.000 spectateurs et a vendu plus 100.000 DVD de son spectacle et ce sans compter les téléspectateurs de Ruquier et autres émissions dans lesquelles il a fait sa promo.
Ceci participe de façon insidieuse à restreindre l’homéopathie, à l’enfermer dans des stéréotypes, des pseudo-vérités qui poussent la population à l’imaginer non scientifique voire sacrément ridicule et malhonnête.
Qui aurait envie de faire l’effort d’ouvrir des livres, de rechercher, de se documenter, de confronter ce qu’on leur a apporté sur un plateau?
Les idées reçues
- « l’homéopathie, ce n’est que de l’eau et du sucre« . « autant manger un paquet de fraises tagada et se faire plaisir plutôt que de prendre ces granules de sucre, ça soignera pareil ».
Ce sera abordé plus tard, il est d’ores et déjà établi que c’est autre chose que de l’eau et du sucre.
En attendant, ces phrases, ancrées dans l’inconscient collectif telles des légendes urbaines empêchent toute démarche d’ouverture et d’étude sérieuse du sujet pour ne pas dire un rejet en bloc. - L’homéopathie = recettes de grands-mères.
De fait, elle est utilisée depuis 250 ans mais pas par des grands-mères. Ce sont des médecins, pharmaciens, vétérinaires qui l’utilisent et ce avec un état d’esprit rigoureux, fidèle à celui de Hahnemann qui l’a fondée.
On nous imagine lever le petit doigt pour sentir le sens du vent afin de choisir nos médicaments.
Détrompez vous, nous travaillons avec une méthode précise qui ne laisse rien au hasard.
Pas facile à faire admettre, encore moins à témoigner car peu de gens font la démarche de confronter leurs a priori avec notre quotidien.
Les freins scientifiques
Difficile d’avoir envie d’étudier l’homéopathie ou de la prendre au sérieux
avec tout ce qui est écrit ci-dessus.
Elle est a priori non scientifique et ce même sans arguments réellement scientifiques.
Imaginer alors la difficulté de franchir le cap quand, en plus, il existe de réels éléments scientifiques à charge contre l’homéopathie.
Je vais les lister et les analyser ci-dessous.
- L’effet placebo.
Définition: l’effet placebo correspond au résultat psycho-physiologique positif (bénéfique) constaté après l’administration d’une substance ou la réalisation d’un acte thérapeutique, indépendamment de l’efficacité intrinsèque attendue du traitement.
Si vous êtes un minimum honnête en (re)lisant cette définition, vous acquiescerez que cet effet s’applique et existe pour toutes les thérapies existantes y compris la médecine conventionnelle. Il est d’ailleurs pris en compte dans les études mises en œuvre pour juger de l’efficacité de tout nouveau médicament mis sur le marché.
Réduire l’homéopathie à cet effet est donc tout bonnement réducteur de même que cela le serait pour n’importe quelle médecine.
Allons un peu plus loin et abordons deux catégories de patients dont l’une m’est familières: les nourrissons et les animaux.
Lorsque nous utilisons des médicaments pour soigner ceux-ci, ils sont dissouts et administrés via l’eau de boisson.
Nourrissons et animaux n’ont donc pas conscience ou connaissance de prendre un traitement, quel qu’il soit: comment alors parler encore d’un effet placebo? Cela peut se discuter avec les nourrissons dont les parents peuvent parfois verbaliser et communiquer à leurs enfant qu’il s’apprête à prendre un traitement. Même remarque pour les animaux de compagnie voire les chevaux.
Expliquez moi alors qu’en est-il lors de traitement de troupeau de vaches, brebis, chèvres, de ruches…!
Il faut accepter que l’homéopathie va forcément plus loin que ce seul effet afin de l’aborder avec un regard scientifique, celui qui remet en cause, confronte, étudie et repart de zéro pour avoir un regard neuf.
Pour terminer sur cet effet, l’Académie Vétérinaire Française a émis un avis en juin 2021 sur l’homéopathie après audit de différents vétérinaires pratiquant l’homéopathie.
Elle y abandonne plus ou moins l’effet placebo, à la faveur d’un effet « contextuel » dont voici la définition:
correspond à l’ensemble des effets non spécifiques qui en médecine vétérinaire renvoient principalement aux biais subjectifs correspondant aux modifications d’appréciation et de jugement portées sur les critères de la maladie et leurs évolutions par le prescripteur et le propriétaire.
Belle pirouette d’après moi, les professeurs des écoles vétérinaires apprécieront surement que d’après cet avis nombreux sont leurs élèves devenus docteurs vétérinaires et pourtant incapables d’apprécier et de juger une maladie et son évolution! - Le nombre d’Avogadro: une mole correspond à la quantité d’un corps pur contenant 6,023 1023 molécules.
On est dans du langage et des notions purement scientifiques, accrochez vous, je vais tacher de vulgariser.
En dessous de ce fameux nombre, on n’est tout simplement plus capable à l’heure actuelle de mesurer, de quantifier la matière.
On considère ainsi, puisque ce n’est plus mesurable, qu’il n’y a plus rien.
C’est ce qui est en effet atteint à partir des dilutions 12CH dont chaque mole de la substance mère a alors été diluée 10-24 fois.
Ce frein est celui le plus compréhensible à mon sens pour celles et ceux qui opposent des arguments scientifiques à l’homéopathie: comment pourrait-elle bien agir si elle ne contient plus rien?
Un élément de réponse consiste à émettre la théorie qu’elle agit autrement que les médicaments conventionnels, autrement que sur un mode principe actif-récepteur.
Une fois ouvert à cette possibilité, on peut alors avancer, continuer à étudier le sujet, à chercher quelle serait ce mécanisme d’action.
C’est facile me direz vous mais n’est-ce pas l’essence de la démarche scientifique? Constater des faits qui remettent en cause les connaissances en place puis émettre des hypothèses pour aller plus loin que ces connaissances avant d’enfin faire de la recherche pour confronter ses hypothèses.
Il se trouve que c’est notre démarche, nous (praticien.nes utilisant l’homéopathie) constatons comme nos confrères l’impossibilité que l’homéopathie puisse avoir quelconque efficacité à travers le seul filtre du nombre d’Avogadro et nous encourageons à la recherche pour expliquer nos résultats quotidiens et ceux obtenus depuis 250 ans.
Une des hypothèses actuelles éprouvées est celle portée par le Professeur Marc Henry, spécialiste en physique quantique et dont j’aborderai les travaux plus tard en détail.
Deux choix possibles: s’arrêter là, au nombre d’Avogadro et la barrière qu’il implique et ainsi rejeter l’homéopathie ou s’interroger et participer à la recherche.
Qu’ont fait nos prédécesseurs depuis la Grèce antique jusqu’à aujourd’hui, se sont-ils satisfaits de leurs connaissances, refusant de chercher l’explication aux phénomènes qu’ils observaient et les entouraient?
La question est évidemment rhétorique. - « Il n’existe pas d’études prouvant l’efficacité de l’homéopathie« .
C’est totalement faux, je détaillerai certaines de ces études dans un autre article. Elles existent mais n’ont pas le traitement médiatique adéquat, les rendant inconnues pour celles et ceux qui ne la pratiquent et/ou ne l’étudient pas.
Concernant les études réalisées à l’heure actuelle et depuis les 20 dernière années: elles sont randomisées et établies pour réaliser une moyenne sur une population la plus large possible.
Lorsque vous pratiquez la médecine conventionnelle avec pour principe que une maladie = un traitement ou un type de traitement, ces études sont tout à fait adaptées pour mesurer l’efficacité des traitements.
Lorsque vous pratiquez l’homéopathie (ou tout autre médecine individuelle), le principe de base est un individu= un traitement ayant pour conséquence par exemple que dans une famille de 3 personnes où sévit une gastro-entérite, il est tout à fait envisageable que chacun reçoive un médicament différent (à la différence de la médecine conventionnelle qui prescrira le même traitement à tout le monde, seule la posologie changera en fonction du poids du patient).
Ces études sont alors tout à fait contre indiquées pour mesurer l’efficacité de cette médecine.
C’est pourtant ce qui est pratiqué. Autant mesurer la température extérieure avec une balance de cuisine!
Ce frein est inconscient car il est méconnu que l’homéopathie est une médecine individuelle (épidémies, intoxications à part) dont il n’est pas possible de tester l’efficacité avec des outils adaptés à une médecine de population.
Voilà pour ce premier article qui doit déjà secouer un peu à sa lecture.
Mr Ferrari, si vous lisez ceci, je suis toujours aussi ouvert à la discussion qu’en 2020 lors de l’envoi de mon mail!
Je pourrai participer à vous documenter puisque vous adorez cela et qui sait même tenter de soigner votre animal par cette médecine 🙂
Prenez le temps de le digérer, posez vous la question de savoir si vous êtes prêt.es à lever ces freins et idées reçues afin d’aller plus loin et de considérer l’homéopathie avec une démarche réellement scientifique.
Cela ne fera pas de vous des convaincus de cette médecine, loin de là.
Ce n’est pas mon but, je cherche juste à inciter à sortir de la pensée unique.
Il vous faudra en effet lire, discuter, confronter vos questions et ensuite seulement vous pourrez avoir un avis éclairé, complet.
Cette démarche vous permettra d’aller au delà de ce qu’on vous propose actuellement: conclure à votre place sur ce qu’est l’homéopathie.